Bien que la plupart des neurones soient générés au cours du développement embryonnaire, certaines régions du cerveau, comme le bulbe olfactif chez le rongeur, ou l'hippocampe chez l'humain, ont la capacité, à l'âge adulte, de renouveler continuellement leurs neurones. Si l'existence de ces néo-neurones adultes est désormais établie depuis une quinzaine d'années, leur fonction demeure, elle, encore inexpliquée, principalement en raison de leur inaccessibilité chez les animaux vivants. En observant sur plusieurs mois l'évolution de neurones apparus à l'âge adulte dans le bulbe olfactif de souris, des chercheurs de l'Institut Pasteur et du CNRS ont pu suivre en direct, de façon exceptionnelle, la formation de connexions entre neurones, leur stabilisation ou leur élimination. De manière inattendue, ils ont pu mettre en évidence une plasticité permanente des connexions que ces néo-neurones établissent avec les circuits qu'ils intègrent. « Nous nous attendions à voir les synapses se stabiliser progressivement, comme cela se produit au cours du développement chez l'embryon. Mais, étonnamment, ces synapses se sont révélées très dynamiques, de la naissance à la mort des néo-neurones. Et ce dynamisme s'est reflété aussi sur les cellules auxquelles ils s'étaient liés », indique le premier auteur de l'étude, Kurt Sailor, de l'Institut Pasteur. Les chercheurs ont marqué les néo-neurones avec une protéine fluorescente verte appelée GFP, facilement visualisable par imagerie. Ces examens ont été menés sur plusieurs mois, afin de suivre le développement complet des néo-neurones, depuis leur naissance jusqu'à leur disparition. Dans les trois premières semaines de leur vie, ces nouveaux neurones ont étendu leurs prolongements cellulaires - ou dendrites - pour former de nombreuses ramifications, qui sont par la suite devenues très stables. Les observations des chercheurs ont permis d'établir que 20 % des synapses entre les nouveaux neurones et ceux préexistants étaient modifiées quotidiennement. Une dynamique qui se retrouve également chez les neurones auxquels les néo-neurones sont connectés. A l'aide de modèles informatiques, les auteurs ont montré qu'un tel dynamisme permettait au réseau synaptique de s'adapter, de manière rapide et efficace, aux modifications sensorielles de l'environnement toujours changeant.